Fado-pop-folk...
Deolinda s'est produit au théâtre de la Renaissance à Mondeville ( près de Caen ) dans le cadre d'un festival ( Super Monde ) consacré au Portugal.
Et moi, qui suis fan de ce groupe, je ne pouvais pas manquer un telle rencontre... J'ai donc parcouru 130 km, rien que pour l'aller et ce après ma journée de travail, afin de me perdre corps et âme dans l'univers de ce groupe emblématique de Lisbonne.
Bilan ? Un spectacle à la hauteur de mes attentes : j'ai suivi bouche bée le jeu de scène de la chanteuse, j'ai ri, j'ai chanté, j'ai rêvé et j'ai même versé une larme ou deux... Une heure et demi de pures émotions !
Vous pensez bien que cela m'a donné envie de partager avec vous cette expérience...
On commence par un petit pitch ?
Alors Deolinda, c'est d'abord une histoire de famille, celle de deux frères lisboètes ( Pedro Da Silva Martins et Luis José Martins ), véritables surdoués de la guitare classique ( le plus jeune, Luis José, a remporté le premier prix dans plusieurs conservatoires ).
L'ainé a commencé une carrière de scénariste pour la télévision portugaise mais, ratrappé par le virus de la musique, il se lance très vite dans la composition de chansons au sein d'un premier groupe ( Bicho de 7 cabeças - la Bête à 7 têtes ) dont partie son frère.
Suite à l'écriture d'une série de textes et de musiques marqués par une atmosphère très forte, nait l'idée d'une association avec les membres du groupe Lupanar : leur cousine Ana Bacalhau et son mari Zé Pedro Leitão ( contrebassiste de jazz né dans la jolie petite d'Aveiro ). Deolinda est né !
Deolinda est un prénom féminin ( la beauté de Dieu ), celui d'une célibataire d'une trentaine d'années qui vit dans la banlieue de Lisbonne avec son poisson rouge et ses deux chats. Vraie ou fausse commère, elle raconte la vie qu'elle observe depuis sa fenêtre...
Si l'influence musicale première du groupe est clairement le fado, il ne revêt pas ses habituels accents mélancoliques. La guitare portugaise ( à douze cordes ) est d'ailleurs absente...
Selon les Deolinda, à quoi bon coller à l'image du fado traditionnel ? La dictature est loin, le fado n'a plus besoin d'être aussi triste... Les Deolinda le veulent gai, burlesque et tendre. Ils le veulent aussi teinté de pop et de folk.
La musique des Deolinda est celle d'un groupe qui se veut à mi-chemin entre tradition et modernité. Celle d'un groupe qui se veut aussi portugais qu'européen...
Ana Bacalhau, Pedro Da Silva Martins, Zé Pedro Leitão et Luis José Martins.
Photos de Rita Carmo au Marché de Ribeira ( le plus grand marché de Lisbonne ).
Ana explique en français ou en anglais ( langue qu'elle maîtrise parfaitement ) les petites histoires que racontent les chansons composées par Pedro. Elle est très charismatique sur scène ( je le précise car elle est toute timide et toute douce dans la vraie vie ) : on la voit bouger, danser, mimer, grimacer, sourire, prendre des postures tristes,...
Son interprétation est riche... Ana est une comédienne. Et si parfois, elle a une gouaille de kéké lisboète, sa voix grave peut aussi devenir douce et presque cristalline lorsqu'elle évoque l'amour et l'espoir.
Dès le premier album ( chanson à côté * - CD sorti en 2008 ), le succès est immédiat ( disque de platine )...
Le deuxième album intitulé " deux timbres et un cachet / un tampon " ( pendant la dictature de Salazar, un document devait toujours avoir deux timbres et un cachet pour être reconnu officiel ) affirme une identité musicale trouvée et validée.
Le style Déolinda oscille entre musiques rythmées et ballades romantiques. Il est profondément encré dans la tradition portugaise ( fado - marchas populares de santo Antonio ) et la musique folk européenne.
Pour terminer, voici deux chansons qui offrent deux autres visions du groupe Deolinda...
La première ( parva que sou - que je suis "conne" ) se veut revendicative, elle parle de la crise et de la situation économique au Portugal. Elle a fait un buzz terrible l'an dernier et s'est transformée en hymne pour la jeunesse lusitanienne...
La deuxième ( Brasileira canta fado - une brésilienne chante le fado ) est très drôle et raconte l'histoire une brésilienne qui veut chanter le fado mais le transforme en samba...
Le concert a été suivi d'un cocktail avec boissons et spécialités portugaises. Les membres du groupe nous ont rejoints vingt minutes plus tard pour une séance de dédicaces.
J'aimerais les remercier pour leur incroyable gentillesse, disponibilité, patience, humilité,...
Merci Ana, Pedro, Luis José et Zé Pedro ! C'est chouette de se rendre compte que l'on aime et admire des personnes aussi vraies !
Je suis alentejane ( do concelho da Vidigueira près de Beja ) mais j'aime profondément Lisbonne où j'ai passé tant de vacances pendant mon enfance et mon adolescence ( une partie de ma famille y vit ). C'est la ville de mon coeur. J'ai envie de vous dire que vous sentez, vous respirez, vous transpirez cette ville. J'ai humé son parfum pendant quelques heures grâce à vous ce vendredi...
Et voilà, je suis atteinte de Deolindamania ( pour la petite histoire c'était le prénom de ma grand-mère " algarvia "et c'est le prénom de ma petite soeur qui elle, par contre, est mariée hé hé ) pour un long, très long moment...
Après Madredeus, vous êtes les nouveaux ambassadeurs de la culture portugaise dans le monde...
That's not all folks !
P.S. Cet article n'est pas terminé ( il sera certainement agrémenté d'une interview ). N'hésitez pas à me contacter au sujet des paroles de ces chansons. je peux les ajouter à ce billet et même les traduire...
* canção ao lado pourrait signifier : chanson à portée de main ( l'idée étant qu'on l'emmène partout où l'on va ).
Fado Toninho : parle d'un gars qui se croit beau et irresistible. En fait, c'est un beauf !
Fon fon fon : raconte l'histoire d'une fille qui est amoureuse d'un gars qui joue du tuba dans une fanfare. Tout le monde lui dit que ce n'est pas une musique " noble " mais elle trouve ça si romantique.
Um contra o outro ( l'un contre l'autre ) : explique qu'il vaut mieux sortir et rencontrer les autres plutôt que passer son temps à jouer aux jeux vidéos.
Passou por mim e sorriu ( il est passé à côté de moi et a souri ) : une magnifique chanson ( j'ai écrasé une petite larme et même deux en l'écoutant au concert ) dans laquelle une jeune femme raconte que le sourire de celui qu'elle aime en secret transforme le monde en poésie et en fête.
Sem noção ( sans conscience ) : est une de mes chansons préférées. Elle est adressée à un garçon qui n'a pas conscience de qui il est et surtout de qui l'aime.
Um ilha ( une île ): est une chanson d'une poésie incroyable. Un bel hommage au défunt groupe Madredeus et sa chanteuse Teresa Salgueiro ( soyez curieux allez découvrir ce magnifique groupe sur youtube ).
Si, comme moi, vous tombez amoureux de Deolinda sachez que leurs CD ( ainsi que des chansons à télécharger ) sont en vente à la FNAC France ( en boutique ou en ligne ) !
Seul le double album + DVD du concert donné au Colisée ( Portugal ) en 2011 ( Deolinda no Coliseu dos Recreios ) est à commander sur le site de la FNAC Portugal ou sur Amazon.
Retrouvez les Deolinda sur leur site internet : http://www.deolinda.com.pt